La Isla Minima, Alberto Rodriguez (2014)


J'aime les polars. Depuis toujours et sous toutes leurs formes, j'aime les polars, bien noirs si possible ; sans sucre, serrés, denses. J'aime les vieux flics mélancoliques et pleins de failles qui traînent leur spleen en décortiquant la noirceur du monde à la recherche de ce qui le pourrit. J'aime ces ambiances moites qui s'acoquinent avec un air jazzy dans les bas-fonds urbains, dans ces endroits glauques où rôde la mort. Seven constitue à mes yeux l'un des mètres-étalons de ce qui peut se faire de mieux dans ce registre et c'est avec ce type de références en tête que je suis allée voir le très prometteur polar de l'été, La Isla Minima.

Et le moins que l'on puisse dire c'est que Rodriguez tient ses promesses !
Tout y est, du flic désabusé dont le passé louche affleure dangereusement, au jeune premier encore plein d'une naïve détermination en passant par une ambiance lourde d'où suinte la haine et les promesses déchues d'une Espagne post-franquisme. Oui, tout y est, avec en plus ce petit supplément d'âme incarné par la région magnifique où le film a été tourné. Le Parc National de Guadal­quivir et ses marais sont fascinants, véritables labyrinthes végétaux où serpentent les bras d'eau dans lesquels on se perd, au sens propre comme au figuré. 

L'ambiance du film est trouble, la photo magnifique et les paysages splendides... perfection absolue alors ? Eh bien malheureusement pas tout à fait. Car malgré une impressionnante maîtrise de la mise en scène, des cadrages et de la lumière (oh quel ravissement pour les yeux que ces jeux d'ombre et de lumière sur le marais !), Rodriguez se plante un peu au niveau de l'intrigue.

La construction linéaire rend la narration monotone. Le fil de l'intrigue se déroule mollement, sans à coups ni secousses dans le rythme. C'est plat, et c'est bien le comble avec un paysage aussi sinueux. Il y avait pourtant matière à faire quelque chose de grandiose, et on n'en est vraiment pas loin. Il aurait fallu un peu plus de panache, de noirceur et surtout de peps dans l'intrigue. La résolution du crime n'apporte en définitive aucune satisfaction tant elle est dénuée d'enjeu et les personnages semblent se débattre sans cesse avec les mêmes problématiques.

Mais si l'on quitte la salle en restant un peu sur sa faim, on ne regrettera certainement pas les presque 2h passées en Andalousie ! A voir absolument pour qui est un brin sensible à l'image et à l'ambiance !!

★★★

La Isla Minima, Alberto Rodriguez (sortie le 15 juillet 2015)
Avec  Raúl Arévalo, Javier Gutiérrez (II), Antonio de la Torre - Espagne - 1h44

Synopsis
Deux flics que tout oppose, dans l'Espagne post-franquiste des années 1980, sont envoyés dans une petite ville d'Andalousie  pour enquêter sur l'assassinat sauvage de deux adolescentes pendant les fêtes locales. Au coeur des marécages de cette région encore ancrée dans le passé, parfois jusqu'à l'absurde et où règne la loi du silence,  ils vont devoir surmonter leurs différences pour démasquer le tueur.

Une cinéphile

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire