Des petits bouts d'éternité

J'ai vraiment du mal, beaucoup de mal, à comprendre l'engouement autour de ce Saint Laurent...
Après une première version sortie en début d'année avec Pierre Ninez, voici donc un 2e film sur le même sujet en quelques mois. Lubie du cinéma français qui m'agace particulièrement. Comme s'il n'y avait pas assez de sujets à traiter sans se tirer une balle dans le pied en montant deux projets similaires en même temps... Mais passons.

Là où le film de Jalil Lespert balayait toute la vie de Saint Laurent, la version de Bonello ne s'attache qu'à une courte période, sans doute la plus sulfureuse et la plus emblématique du personnage. Et les deux films ont par ailleurs une vision bien différente, non pas de Saint Laurent... mais de Pierre Bergé. C'est un aspect qui m'avait d'ailleurs particulièrement marquée dans le premier film, cette espèce de tapis rouge déployé pour Bergé qui était présenté comme un véritable Saint. La version de Bonello permet sans doute de relativiser cela et introduit un peu plus de nuances dans leur relation.

C'est à mes yeux le seul intérêt de ce film, qui même s'il est supérieur à celui de Lespert en termes de réalisation, m'a néanmoins semblé dramatiquement chiant et pompeux.
Gaspard Ulliel s'en sort très bien et propose une interprétation vraiment réussie de ce personnage singulier, mais en dehors de ça le schéma du film est très répétitif et à mon sens mal construit. J'ai eu le sentiment d'un empilement de saynètes sorties d'une biographie plus ou moins officielle et supposées illustrer la personnalité de Saint Laurent.

Très décousu, le film montre sans cesse le même type de scènes de dessin (quel génie) d'atelier (quel tyran), de drogue (quel dépravé), de boîte de nuit (quel fêtard), de doute (quel anxieux)... Les scènes de sexe quant à elles, sont pour le coup complètement ridicules ! Je ne sais pas si c'était une clause dans les contrats des acteurs ou si Bonello avait peur de choquer un public "Manif pour tous"... mais dans des situations où l'on a l'habitude de voir des scènes sensuelles quand il s'agit de personnages hétéros, ici chaque moment où les acteurs se touchent sont lourds et empesés et c'est à peine si l'on voit un baiser.

Il y a néanmoins quelques aspects positifs pour ce film engoncé : des images sublimes et un aperçu de l'ambiance côté atelier. J'aurais aimé que le film aille plus dans ce registre et montre plus les coulisse d'un monde passionnant que la déchéance d'un homme...

★☆☆☆☆

Saint Laurent, Bertrand Bonello (sortie le 24 septembre 2014)

Avec Gaspard Ulliel, Jeremie Renier, Lisa Ulliel, Lea Seydoux, Louis Garrel - France - 2h15

Synopsis